
Dans un monde où les parents sont constamment jugés sur leurs méthodes éducatives, une tendance troublante a émergé sur les réseaux sociaux : le “Ghetto-ssori”.
Ce détournement de la pédagogie Montessori, souvent présenté sous forme humoristique, soulève des questions importantes sur notre rapport à l’éducation bienveillante.
Que dirait Maria Montessori elle-même face à ce phénomène ?
Cet article propose un voyage dans le temps pour rappeler les origines et valeurs fondamentales de cette pédagogie révolutionnaire.
Les 3 plus gros problèmes avec cette trend “Ghetto-ssori” c’est qu’elle :
- Se base sur des infos erronées: les principes fondamentaux de la pédagogie Montessori sont largement détournés par les “adeptes” qui en font la promotion alors forcément ceux qui se place en opposition avec leur “Ghetto-ssori” ne savent même pas de quoi il s’agit au départ…
- Normalise la violence éducative ordinaire (VEO) : Cette tendance met parfois en avant des punitions, des cris, des mises à l’écart et autres actions en contradiction avec ce qu’on sait être aujourd’hui bénéfiques pour l’enfant et le lien parent/enfant.
✅Rappel: la loi du 10 juillet 2019, interdit les punitions corporelles, les humiliations et les violences psychologiques. Les parents ont le droit et le devoir d’autorité, mais doivent l’exercer sans violence physique ou psychologique.
- Surfe sur la viralité : Sur les réseaux sociaux, certaines vidéos humoristiques présentant ces pratiques comme des solutions “pragmatiques” et récoltent des millions de vues, des parents en mal de visibilité ajoutent leurs vidéos en espérant récolter des “J’aime” et des “vues” reléguant le soin apporté à nos enfants comme une simple mode!!
Les véritables racines de la pédagogie Montessori : un contexte social souvent oublié
Contrairement à ce que beaucoup imaginent aujourd’hui, Maria Montessori n’a pas développé sa méthode dans des écoles privées pour enfants privilégiés.
Sa pédagogie est née dans les quartiers défavorisés de Rome, auprès d’enfants marginalisés par la société.
- La Casa dei Bambini : En 1907, dans le quartier pauvre de San Lorenzo à Rome, Maria Montessori ouvre sa première “Maison des Enfants” pour accueillir des enfants dont les parents travaillaient toute la journée et qui étaient livrés à eux-mêmes.
- Un travail auprès d’enfants en difficulté : Avant cela, en tant que première femme médecin d’Italie, elle avait travaillé avec des enfants considérés comme “déficients mentaux”, démontrant qu’avec un environnement adapté, ils pouvaient progresser bien au-delà des attentes de l’époque.
- Une approche scientifique et sociale : Sa méthode n’était pas une théorie abstraite, mais le fruit d’observations rigoureuses dans des contextes sociaux difficiles, où elle cherchait à offrir une dignité et un avenir à des enfants souvent négligés.
Une éducation à la paix dans un monde divisé
Maria Montessori a vécu à travers deux guerres mondiales et a développé sa pédagogie comme une réponse directe aux violences et divisions de son époque. Son objectif n’était pas seulement éducatif, mais profondément humaniste.
“L’enfant est à la fois un espoir et une promesse pour l’humanité.” – Maria Montessori
- Éducation à la paix : Pour Montessori, l’éducation était le moyen le plus puissant de construire un monde pacifique. Elle croyait fermement que des enfants élevés dans le respect développeraient naturellement un comportement pacifique envers les autres.
- Reconnaissance de la dignité : Au cœur de sa philosophie se trouvait la conviction que chaque enfant, quelle que soit son origine sociale, méritait d’être traité avec dignité et respect.
- Un mouvement international : Son travail a rapidement dépassé les frontières italiennes pour devenir un mouvement mondial pour la paix par l’éducation, reconnu par des organisations internationales.
Ce que Maria Montessori dirait du “Ghetto-ssori”
Si Maria Montessori pouvait observer cette tendance moderne qui déforme sa philosophie, quelles seraient ses réactions ?
On est nombreuses à s’être déjà posé la question de ce que Maria penserais, de cette mode “Montessori” qui déferle sur notre société de consommation.
Que dirait t’elle des jeux, livres et autres joyeusetés n’ayant rien à voir avec ce qu’elle a créé et qui se vendent à prix d’or? Comment vivrait elle cette idée fausse qui fait croire à tord aux parents qu’il faut posséder (du matériel!) pour être ( de bons parents/ éducateurs)!
J’ai ma petite idée, soufflée par ma formatrice Yvette Pons-Ghersi
“Continue de bien faire et laisse dire”
Toutefois j’avais envie de faire preuve d’un peu d’imagination au sujet de cette tendance de Ghetto-ssori qui enflamme la toile…
1. Maria soulignerait une profonde incompréhension des principes fondamentaux de son approche
Maria ontessori pointerait certainement que beaucoup da parents qui clament mettre en place sa méthode déforment complètement l’essence de sa philosophie.
Elle pourrait leur démontrer avec tact et fermeté qu’ils sont responsables en partie de la déferlante de critiques envers sa philosophie.
Le “Ghetto-ssori” est un symptôme de cette incompréhension généralisée des principes fondamentaux qu’elle a établis.
- Le respect comme principe non négociable : Pour elle, le respect de l’enfant n’était pas un “luxe” ou une “option”, mais la base même de toute relation éducative saine.
- La discipline vs la punition : Montessori distinguait clairement la discipline intérieure (que l’enfant développe naturellement dans un environnement adapté) des punitions extérieures, qu’elle considérait comme contre-productives.
- L’observation scientifique : Elle rappellerait que sa méthode n’est pas un ensemble de croyances, mais le résultat d’observations scientifiques rigoureuses sur le développement naturel de l’enfant et se réjouirait que nous disposions aujourd’hui de nombreuses études en neuro-science qui nous permettent d’adopter des comportements respectueux et structurant.
2. Maria serait empathique et compréhensive envers les parents qui subissent des pressions parentales énormes
En tant que femme ayant elle-même fait face à d’immenses défis personnels et professionnels, Maria Montessori comprendrait les pressions que subissent les parents aujourd’hui :
- Le manque de soutien social : Elle serait probablement consternée par l’isolement des familles modernes, contrairement aux structures communautaires plus présentes à son époque.
- La charge mentale parentale : Maria Montessori reconnaîtrait que la parentalité moderne est devenue extraordinairement complexe, avec des attentes souvent irréalistes, que l’évolution de la société rajoute des difficultés supplémentaires au rôle de parents ( manque de temps, écran, consommation, alimentation…)
- La préparation à la parentalité : Elle soulignerait comme elle le faisait déjà il y a 100 ans que “la venue d’un enfant se prépare 20 ans avant” – phrase qu’elle utilisait pour indiquer que nous devrions tous être préparés dès notre propre enfance à devenir parents, alors qu’aujourd’hui beaucoup de futurs parents idéalisent et rêvent une parentalité clichée qui ne correspond pas du tout à la réalité de la majorité des jeunes parents ( merci les séries télé qui absentéïsent les enfants, les rendant de simples objets qu’on pose et qui dorment!)
3. Maria offrirait un appel à construire ensemble plutôt qu’à pointer les défaillance et contradictions des uns et des autres.
Face à la tendance du “Ghetto-ssori”, Maria Montessori nous inviterait à une réflexion plus profonde :
- Au-delà de l’humour défensif : Elle trouverait probablement triste que la dérision et l’humour autour des “mauvaises pratiques parentales” soient devenus un mécanisme de défense…
- La vulnérabilité plutôt que la bravade : Plutôt que de glorifier nos moments de faiblesse, elle nous encouragerait à être vulnérables sur nos difficultés parentales pour chercher un véritable soutien, cherchant l’aide de nos proches pour toujours offrir mieux à nos enfants.
- L’enfant comme témoin : Elle nous rappellerait que nos enfants sont témoins de tout, y compris de la façon dont nous parlons d’eux sur les réseaux sociaux. Ce que la neuro-science appelle désormais les neurones miroirs, Maria Montessori le nommait l’esprit absorbant! Quelle image, quelle habitude, quelle normalité offrons nous ainsi à nos enfants?
Pourquoi l’entraide est préférable à la division
Les défis universels de la parentalité
Au-delà des différences d’approche, tous les parents partagent des défis communs :
- La fatigue et l’épuisement : Quel que soit le style parental adopté, tous les parents connaissent des moments de doute et d’épuisement.
- Le manque de soutien sociétal : Notre société moderne n’offre pas toujours les structures de soutien dont les familles ont besoin.
- La quête d’équilibre : Chaque parent cherche à concilier vie professionnelle, personnelle et familiale, souvent avec des ressources limitées.
Comment honorer l’héritage de Maria Montessori aujourd’hui
Plutôt que de se laisser séduire par des tendances qui déforment sa philosophie, comment pouvons-nous véritablement honorer l’héritage de Maria Montessori dans notre contexte moderne ?
Adapter sans dénaturer
- Principes vs méthodes : Distinguer les principes fondamentaux (respect, autonomie, environnement préparé) des méthodes spécifiques qui peuvent être adaptées à notre époque.
- Accessibilité : Rendre la pédagogie Montessori accessible à tous, comme elle l’était à l’origine, plutôt qu’un privilège réservé à une élite. L’une des plus grande clé est l’observation avec humilité, donc on doit pouvoir s’adapter selon le contexte et selon l’enfant!
- Engagement communautaire : Raviver l’aspect social et communautaire de la pédagogie Montessori, en créant des espaces d’entraide entre parents.
Accompagner plutôt que juger
Face aux défis parentaux modernes, nous pouvons adopter l’attitude que Maria Montessori avait envers les enfants :
- Observer sans juger : Prendre le temps d’observer nos propres réactions et celles des autres parents avec bienveillance.
- Créer un environnement favorable : Tout comme elle préparait l’environnement pour les enfants, nous pouvons préparer un environnement social qui soutient les parents.
- Célébrer les succès : Reconnaître et célébrer les moments de parentalité respectueuse, aussi petits soient-ils.
Créer des espaces de dialogue sans jugement
En tant que formatrice spécialisée en communication respectueuse et en pédagogie Montessori, j’observe quotidiennement combien les parents s’épanouissent lorsqu’ils se sentent écoutés plutôt que jugés :
- Reconnaître les émotions parentales : La colère, la frustration ou l’impuissance sont des émotions légitimes qui méritent d’être accueillies plutôt que stigmatisées.
- Partager des outils concrets : Offrir des alternatives pratiques aux VEO est plus efficace que de condamner sans proposer de solutions.
- Valoriser les petits pas : Chaque progrès vers une parentalité plus respectueuse mérite d’être célébré, peu importe son ampleur.
Ateliers et cercles de paroles
C’est ce que nous faisons dans plusieurs de mes propositions notamment avec l’élan des professionnelles des centres sociaux comme celui de Fourchambault ou de Saint Saulge, où nous avons pu dernièrement proposer des ateliers à destination des parents pour échanger sur des thématiques qui les concernent et les touchent particulièrement comme :
- l’accompagnement des émotions,
- le soutien à la scolarité,
- le sommeil,
- la vie et couple… et tant d’autres !
Les espaces de cercles de Pleine Lune et de cercles Effet’Mères sont également des lieux où nous abordons souvent les défis auxquels nous sommes confrontées en tant que femmes et que mamans, cela nous permet de repartir plus légères et parfois même avec des pistes à explorer pour un réel mieux être!
Au-delà des clivages, l’intérêt supérieur de l’enfant
Si Maria Montessori était parmi nous aujourd’hui, elle nous inviterait probablement à dépasser les polémiques et les tendances virales pour nous reconnecter à l’essence de sa philosophie : le profond respect de l’enfant comme être humain à part entière.
Elle nous rappellerait que sa méthode n’a jamais été réservée aux enfants privilégiés – bien au contraire, elle est née dans l’adversité, auprès d’enfants que la société avait marginalisés. Elle nous encouragerait à voir au-delà des divisions sociales et des guerres de méthodes pour nous concentrer sur ce qui compte vraiment : créer un monde où chaque enfant peut développer son plein potentiel.
Dans un monde où l’humour défensif et la polarisation sont devenus la norme, peut-être que le message le plus radical de Montessori serait simplement celui-ci : l’éducation respectueuse n’est pas un luxe, mais un droit fondamental de chaque enfant, et notre responsabilité collective en tant que société.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Aviez-vous connaissance des origines sociales de la pédagogie Montessori ? Comment équilibrez-vous les principes éducatifs avec les réalités quotidiennes de la parentalité ? Partagez vos réflexions en commentaires pour continuer cette conversation importante.
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